Accueil Édouard Onno, chef de la cellule qualité de l’eau à la Dreal Pays de la Loire : “L’état des masses d’eau n’est pas forcément moins bon, mais la photo est plus précise” P

Édouard Onno, chef de la cellule qualité de l’eau à la Dreal Pays de la Loire : “L’état des masses d’eau n’est pas forcément moins bon, mais la photo est plus précise” P

Avec les nouvelles règles de mesure du bon état, certaines masses d’eau ont pu être déclassées. Leur qualité ne s’est pourtant pas forcément détériorée. Explications.

Comment est aujourd’hui mesurée la qualité de l’eau ?

Les politiques qui visent au bon état des masses d’eau découlent de la directive-cadre sur l’eau (DCE). Sa transcription aboutit à un système qui normalise et classe l’état général de chaque masse d’eau selon un processus précisément défini. Ce système est identique sur l’ensemble du territoire national mais s’adapte aussi au type de masse d’eau. Des objectifs politiques fixent ensuite les seuils et le nombre de masses d’eau en bon état à atteindre. Précision : une masse d’eau, c’est un bout de bassin versant homogène. Les paramètres qui définissent le bon état sont essentiellement biologiques. C’est sur eux que repose le verdict, mais l’impact des mesures physico-chimiques est aussi pris en considération afin d’obtenir une photo complète. On examine en fait toute la chaîne alimentaire, en quatre grands groupes biologiques : diatomées, végétaux, macro-invertébrés, poissons.

Comment juge-t-on du bon état ?

Le bon état, c’est à la fois la mesure de la qualité de l’eau et la vérification que la rivière offre des habitats suffisants pour le développement des espèces. Par exemple, on ne trouvera pas les mêmes espèces dans deux rivières dont la qualité physico-chimique est bonne mais dont l’une est pleine d’obstacles. En fait, on regarde tous les paramètres. La logique, c’est de parler d’élément déclassant. Ce n’est pas une moyenne : tout doit être en bon état. One out, all out, comme on dit en anglais. L’objectif ensuite est d’atteindre une certaine proportion de masses d’eau en bon état. Sur le plan national, c’est deux tiers, par contre, sur la région Pays de la Loire où nous avons actuellement environ 10 % de masses d’eau en bon état, l’objectif est bien évidemment plus mesuré.

Aujourd’hui, les paramètres qui permettent de juger du bon état des masses d’eau évoluent. Pourquoi ?

Chaque pays est libre de choisir sa méthode d’évaluation. Tous les indices sont simplement étalonnés au plan européen afin de vérifier leur cohérence. L’évolution de nos paramètres est due au fait que nous devions homogénéiser nos méthodes avec les autres pays d’Europe. Parallèlement, certains de nos critères biologiques n’entraient pas dans les exigences de la DCE. Ces nouvelles dispositions ont été prises en compte à partir des données 2013 qui sont sorties récemment.

Concrètement, qu’est-ce qui change ?

Il y a deux principales nouveautés. La première touche à la variabilité naturelle. Les indices sont en effet impactés par un effet annuel, la météorologie, les débits… Jusqu’ici, la photo que nous prenions était pondérée sur deux ans, elle l’est désormais sur trois années afin de lisser les choses. La seconde nouveauté, c’est l’apparition d’un nouvel indice sur les macrophytes – les végétaux aquatiques – en rivière. Il était déjà mesuré mais pas utilisé pour la détermination du bon état. Cela n’a pas beaucoup d’incidence chez nous.

En quoi ces nouveaux paramètres impactent-ils l’état écologique de nos masses d’eau ?

Sur le bassin Loire-Bretagne, le constat global est de 3 à 4 % de masses d’eau en bon état en moins par rapport à l’état calculé en 2011. Au-delà de l’évolution des règles d’évaluation, c’est également lié au fait que l’Agence de l’eau réalise désormais beaucoup plus de mesures. Auparavant, l’état de nombreuses masses d’eau était jugé à partir de modélisations, or, celles-ci apparaissent plutôt optimistes. Le fait de passer en mesures réelles a pu provoquer des déclassements. Cela dit, l’Agence de l’eau Loire-Bretagne a refait ses calculs à partir des règles de 2011 : il apparaît qu’environ la moitié des déclassements est liée au changement de règles. Donc, l’état des masses d’eau n’est pas forcément moins bon, mais la photo est plus précise.

Quand peut-on attendre le prochain état ?

Les temps de production et d’analyse sont très longs du fait des validations et qualifications nécessaires. L’état 2015 doit sortir à la fin de cette année.

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