Ingénieur territorial de formation, formé au management stratégique, Laurent Joseph a pris ses fonctions à la direction du SYLOA en février dernier avec une solide expérience au croisement de l’opérationnel, du stratégique et de l’animation territoriale. Dans cette interview, il revient sur les expériences qui ont façonné son parcours, partage sa vision des enjeux à venir et affirme l’importance de la concertation comme levier d’action publique durable.

Laurent Joseph (au centre) lors de la commission territoriale Brière Brivet
Vous avez un parcours riche et varié dans le domaine de l’eau. Quelles expériences vous semblent les plus marquantes ou structurantes pour votre prise de fonction au SYLOA ?
Ma carrière a toujours été guidée par un fil rouge : la gestion concertée des projets de territoire, avec pour socle commun la gestion du grand ou du petit cycle de l’eau. Chaque expérience a joué un rôle clé dans la construction de mon parcours ; elles s’imbriquent, se complètent et créent du sens.
Si je devais retenir les plus structurantes pour ma prise de poste au SYLOA, je citerais :
- L’animation de la concertation pour la mise en œuvre du SAGE de la Scarpe amont, pour la Communauté urbaine d’Arras ;
- L’appui à la création et à la gouvernance du Forum du Champigny, dédié à la connaissance et à la préservation de la nappe des calcaires du Champigny en Brie, pour l’association AQUI’Brie ;
- La co-construction du plan de gestion intégrée des ressources en eau du bassin de la Mitidja, en Algérie, dans une logique participative.
Mes années de terrain au sein d’Atlantic’eau, aux côtés des acteurs sur l’ensemble des aires d’alimentation de captages, ont également été précieuses.
Enfin, ma dernière fonction managériale en tant que directeur de l’eau, de l’environnement, de l’agriculture et de la pêche au Département de la Vendée continue de nourrir ma vision au quotidien.
Qu’est-ce qui vous a particulièrement intéressé dans ce poste ?
Rejoindre une structure comme le SYLOA, engagée face à des défis environnementaux majeurs, et disposant de leviers concrets pour agir durablement sur un territoire aussi emblématique, est une véritable motivation.
L’articulation entre les missions opérationnelles – via la compétence GEMAPI – et la planification territoriale avec le SAGE crée une richesse et une cohérence qui m’intéressent particulièrement.
Les grands défis à venir, qu’il s’agisse d’honorer les ambitions du SAGE ou de déployer efficacement la feuille de route gemapienne du SYLOA, nécessiteront selon moi une capacité collective à objectiver les situations, bâtir des consensus solides, éclairer les décisions, concrétiser les actions, évaluer les effets, et rebondir ensemble dans la durée.
Enfin, sur le plan stratégique, je suis très enthousiaste à l’idée de contribuer à un projet impulsé par l’exécutif du SYLOA fondé sur le principe : « plus on est humain, plus on est efficace… durablement ».
La concertation est une composante essentielle de la gestion de l’eau. Quelle place souhaitez-vous lui donner au sein du SYLOA et sur notre territoire d’intervention ?
La concertation est un levier incontournable pour améliorer la qualité des projets et de l’action publique. Elle facilite leur acceptation, démocratise la décision, et renforce le lien social.
Dans les processus de dialogue territorial, l’ingénierie technico-économique ne suffit pas. Il faut y associer une approche systémique, des perspectives prospectives, des scénarios de durabilité, des démarches participatives, et des processus de décision partagés.
Avec les équipes, je suis particulièrement attentif à la manière de mobiliser les acteurs d’un projet de territoire. Fournir les connaissances, offrir de la matière à débat, permettre l’expression des points de vue et des nuances d’accord : ce sont là les conditions pour faire émerger des futurs possibles.
Mais la concertation nécessite un cadre clair. Elle doit être finement dimensionnée, associer les parties prenantes concernées, s’inscrire dans un processus transparent, et surtout être animée avec rigueur et professionnalisme.
Quels vont être les principaux défis de ces prochaines années pour le SYLOA ?
Je prends le temps d’appréhender ce territoire dans toute sa diversité et sa complexité. Les défis sont immenses, comme le soulignent le nouveau SAGE Estuaire et le contrat territorial Eau Goulaine–Divatte–Robinets.
Le changement climatique, transversal et structurant dans le nouveau SAGE, constitue à mes yeux un enjeu fondamental, car il interroge toutes les dimensions de notre action. La gestion quantitative de l’eau, avec les études HMUC en cours et les prémices de futurs PTGE, est également très actuelle. Elle pose, en toile de fond, la question de notre capacité à agir avec efficacité, responsabilité et pragmatisme — un fil conducteur pour l’ensemble des enjeux du SAGE.
L’estuaire de la Loire représente un défi à part entière : c’est un espace complexe, au croisement d’enjeux écologiques, économiques et sociaux, avec une grande diversité d’usages. Le SYLOA, en tant que structure animant la Commission Locale de l’Eau réunissant l’ensemble des EPCI concernés, a la capacité de faire émerger, avec ses partenaires, un projet territorial partagé. Se posent alors des questions de fond : comment structurer ou non la problématique estuarienne à partir des connaissances disponibles ? Quels échanges produisent des dynamiques durables ? Quel degré d’intensité peuvent-elles atteindre dans le temps ? Et bien d’autres encore…
À court terme, l’un des grands défis est aussi d’assurer la formation des nouveaux élus locaux qui prendront leurs fonctions en 2026. Nous travaillons à une offre de formation sur mesure, pensée pour garantir la transmission entre pairs et renforcer les capacités à faire face aux enjeux liés à l’eau et aux milieux aquatiques.